|
Introduction
Laction-pilote s'est déroulée dans
l'arrondissement de Sig-Noghin (50 000 habitants) à
Ouagadougou. Avec un taux de chômage élevé, une
situation socio-économique des plus précaires et de
mauvaises conditions sanitaires, Sig-Noghin cumule les handicaps. Mais
depuis 1995, les quartiers lotis de l'arrondissement bénéficient
d'un programme de développement, qui permet d'améliorer
la qualité de la vie, l'hygiène et les revenus de la
population.
Les objectifs de ce programme, délégué à
l'ONG EAST, étaient les suivants : l'approvisionnement et la
distribution d'eau potable, la création de services de collecte
des ordures ménagères et des eaux usées, l'aménagement
d'espaces verts et la construction de latrines, la sensibilisation
sanitaire de la population par des associations et des comités
de jeunes animateurs (CJA) sanitaires.
La création des CJA sanitaires répondait aux souhaits
des familles d'impliquer les enfants et les adolescents dans le développement
des quartiers. A mi-parcours du projet, un certain nombre de questions
relatives à leur dynamisme et à leur méthodes se
posaient : |
|
Présentation des CJA
Structures socio-administratives
Lidée initiale était de créer deux types
de CJA, à vocation complémentaire. Le premier rassemble
des adolescents et des adultes non scolarisés, déjà
partenaires dassociations locales, et recherchant un emploi ou
une formation professionnelle. Le deuxième regroupe des enfants
et des adolescents scolarisés.
Organisation
Les CJA sont des organismes de solidarité qui doivent senquérir
des besoins et attentes de la population en matière de santé,
dhygiène et denvironnement. Ils agissent en
concertation avec les autres associations, les services administratifs
et les services municipaux concernés. Ils ont pour objectif de
sautonomiser et ont besoin pour cela dune reconnaissance
officielle.
La première étape était de fournir aux membres
des CJA une formation aux méthodes dIEC (information, éducation
et communication) et de concevoir de nouvelles méthodes danimation
sanitaire, adaptées aux scolaires et aux adultes dans les
quartiers.
Les CJA non scolarisés sont devenus un service social,
mobilisant la population et répondant à sa demande.
Leurs responsabilités essentielles étaient les suivantes
: conseiller et sensibiliser le public en matière de santé,
dhygiène et denvironnement ; participer à
des actions sanitaires de prévention ; veiller à la
salubrité des quartiers périurbains de Sig-Noghin. Par
ailleurs, des formations professionnelles ont été
dispensées aux membres de ces CJA.
Les CJA avaient à assurer leur autofonctionnement à
moyen terme, en cumulant des ressources liées à leurs
activités et des dons. Les frais, engagés par les CJA
scolaires, étaient à couvrir par les comités de
parents délèves (CPE)
Freins à la réalisation du
projet
La méthodologie prévisionnelle a évolué
en fonction des contraintes et difficultés rencontrées :
|
|
Ces difficultés successives se sont traduites
par lintégration de jeunes dans le conseil dadministration
des CJA non scolarisés, par un rapprochement de ces CJA avec
des associations de femmes, responsables de la distribution deau
et de la collecte des ordures, à Sig-Noghin. De plus, tous les
quartiers lotis nont pu bénéficier de lensemble
des interventions prévues initialement, qui se sont concentrées
dans les secteurs les plus défavorisés ou les moins
salubres.
Bilan
Les éléments de réponse aux trois questions
initiales sont les suivants :
-- Les CJA représentent-ils un moyen efficace et un relais
nécessaire pour favoriser la sensibilisation à l'hygiène
et assurer un suivi de proximité des populations ?
Les CJA ont acquis, peu à peu, la confiance dassociations
locales avec lesquelles ils mènent des activités socio-économiques
et sanitaires concertées. Il sagit essentiellement des
associations féminines qui ont aidé les plus jeunes à
diffuser leurs messages et assisté les CJA lors de leurs
causeries : débats avec les CSPS et aux points de regroupements
(bornes-fontaines, marchés).
Tous les animateurs, jeunes et adultes, et les femmes partenaires,
ont bénéficié de formations. Ils sont à même
dassurer la sensibilisation du public et le contrôle de la
salubrité en milieu périurbain. En un an, quinze séances
déducation sanitaire ont été organisées
au profit de 4 000 habitants de Sig-Noghin ; ceci a permis une nette
amélioration de lhygiène domestique.
Suite aux interventions des CJA scolaires, on constate une amélioration
de lenvironnement sanitaire dans toutes les écoles de
Sig-Noghin et un respect des règles de salubrité par les
élèves. Le dynamisme des CJA a de plus été
reconnu par la direction régionale de la Santé.
-- Des méthodes d'information, d'éducation et de
communication (IEC) ayant pour cibles la consommation d'une eau
potable, l'hygiène individuelle et collective et
l'assainissement en milieu périurbain, peuvent-elles être
conçues par les CJA ?
Les méthodes classiques déducation sanitaire sadressent,
en général, au milieu rural. La méthode MARP (méthode
accélérée de recherche participative), qui permet
de valoriser les connaissances et les savoir-faire des populations
locales en tentant de les combiner avec les acquis récents, a été
choisie pour le projet de Sig-Noghin. Mais, en raison de sa complexité,
elle ne sest pas avérée très satisfaisante
en zone périurbaine investie par 50 000 habitants.
La conception et la validation dune nouvelle méthode danimation,
mieux adaptée aux quartiers périurbains, satisfaisantes
et acceptables par tous, paraissaient donc nécessaires.
Cependant, dans le temps imparti au déroulement de laction-pilote
(moins de 18 mois), la méthodologie est demeurée incomplète.
Les jeunes animateurs ont donc privilégié des techniques
bien rodées en les aménageant selon les circonstances et
la qualité du public.
-- Leur viabilité économique et leur insertion dans
les structures institutionnelles et les communautés locales
peuvent-elles être obtenues à court ou moyen terme ?
Les CJA ont maintenant un statut officiel reconnu par ladministration
et la mairie. Ils font partie du comité sanitaire de district,
en phase dorganisation, qui doit être un lieu de
discussion et de concertation entre plusieurs partenaires : mairie de
Sig-Noghin, CSPS, dispensaire, associations pour la salubrité
publique et CJA.
En milieu scolaire, les CJA veillent à la propreté des
locaux et de lenvironnement et assurent la gestion des trousses
de pharmacie ; 11 750 enfants et adolescents y ont bénéficié
de sessions déducation sanitaire.
Les CJA ont trouvé des ressources pour assurer leur
autofonctionnement, grâce à la fourniture de services, à
la création de commerces et à la fabrication de PEP,
dont les associations féminines partenaires assurent, aussi, la
promotion.
Recommandations
La création, lorganisation et la réussite dun
programme CJA dépendent de plusieurs intervenants :
Les institutions
Les différents groupes représentatifs de la population
et les institutions doivent être associés dans lorganisation
du projet ; les bilans intermédiaires dactivités
et de résultats doivent leur être transmis pendant toute
la durée du programme. Une liste dorganismes et de
personnes ressources doit être mise à la disposition des
organisateurs du projet. Le souci majeur est de bénéficier
de lexpérience déjà existante.
La confiance des institutions vis-à-vis des CJA est impérative,
car elle facilite la phase de désengagement des organismes dappui
du projet, à son terme. Une attention particulière doit être
portée à la constitution du conseil dadministration
des CJA qui doit notamment impliquer les associations uvrant
dans les quartiers.
La population
Le succès dun projet CJA va dépendre de la
connaissance de la demande et des besoins de la population et de son
implication dans les activités socio-sanitaires. Une enquête
préalable doit donc être réalisée par des
personnes expérimentées. Elle permettra de plus, en fin
dexercice, destimer limpact réel des actions
des CJA aux niveaux des familles, du milieu ambiant et de la vie
sociale.
Les associations
La création de CJA sanitaires implique de renforcer la crédibilité
des associations de quartiers pour en faire des partenaires et mieux
garantir la viabilité du projet. Tout changement déquipe,
à court terme, est préjudiciable à la crédibilité
des CJA et à leur efficacité, aussi il est demandé
aux jeunes de participer aux activités sociales pendant, au
moins, deux années. En retour, les organisateurs des programmes
et les associations ont à veiller à leur insertion dans
la vie économique locale.
Les outils et les stratégies de communication et de
sensibilisation sont à réaliser avec les bénéficiaires
- les habitants des quartiers - sous la conduite de professionnels. La
formation de formateurs en éducation sanitaire, en milieu périurbain,
est une mesure obligatoire. Les techniques danimation à
préconiser pour diffuser les messages, encore trop
traditionnelles, doivent être améliorées. CJA et
associations de femmes sont les meilleurs acteurs du développement
sanitaire des quartiers, mais tout doit commencer à lécole,
où se créent les bonnes habitudes et les meilleurs
comportements.
En conclusion, les CJA assurent un lien social très important
entre les générations et entre les différents
groupes sociaux. Acteurs du développement, reconnus par la
population, encouragés par les institutions, ils doivent
cependant tirer de leur mobilisation des bénéfices. Il
est très recommandé, dans un projet CJA, dengager
les jeunes animateurs sanitaires non scolarisés dans des
formations professionnelles et de leur créer, dans les
quartiers, des activités génératrices de revenus
en lien avec le développement socio-sanitaire. Cest à
ce prix, que peut être assurée la viabilité des
CJA en milieu périurbain tropical. |