Actions pilotes

Action pilote n°4 : Formation de comités de jeunes dans les quartiers pour la promotion de l'eau potable, de l’hygiène et de l'assainissement en milieu périurbain

[ Rapport ] [ Contacts et fiche technique ]

Introduction

L’action-pilote s'est déroulée dans l'arrondissement de Sig-Noghin (50 000 habitants) à Ouagadougou. Avec un taux de chômage élevé, une situation socio-économique des plus précaires et de mauvaises conditions sanitaires, Sig-Noghin cumule les handicaps. Mais depuis 1995, les quartiers lotis de l'arrondissement bénéficient d'un programme de développement, qui permet d'améliorer la qualité de la vie, l'hygiène et les revenus de la population.

Les objectifs de ce programme, délégué à l'ONG EAST, étaient les suivants : l'approvisionnement et la distribution d'eau potable, la création de services de collecte des ordures ménagères et des eaux usées, l'aménagement d'espaces verts et la construction de latrines, la sensibilisation sanitaire de la population par des associations et des comités de jeunes animateurs (CJA) sanitaires.

La création des CJA sanitaires répondait aux souhaits des familles d'impliquer les enfants et les adolescents dans le développement des quartiers. A mi-parcours du projet, un certain nombre de questions relatives à leur dynamisme et à leur méthodes se posaient :

  • Les CJA représentent-ils un moyen efficace et un relais nécessaire pour favoriser la sensibilisation à l'hygiène et assurer un suivi de proximité des populations ?
  • Des méthodes d'Information, d’Éducation et de Communication (IEC) ayant pour cibles la consommation d'une eau potable, l'hygiène individuelle et collective et l'assainissement en milieu périurbain, peuvent-elles être conçues par les CJA ?
  • Leur viabilité économique et leur insertion dans les structures institutionnelles et les communautés locales peuvent-elles être obtenues à court ou moyen terme ?

L’action-pilote conduite se proposait de répondre à ces interrogations.


Présentation des CJA

Structures socio-administratives

L’idée initiale était de créer deux types de CJA, à vocation complémentaire. Le premier rassemble des adolescents et des adultes non scolarisés, déjà partenaires d’associations locales, et recherchant un emploi ou une formation professionnelle. Le deuxième regroupe des enfants et des adolescents scolarisés.

Organisation

Les CJA sont des organismes de solidarité qui doivent s’enquérir des besoins et attentes de la population en matière de santé, d’hygiène et d’environnement. Ils agissent en concertation avec les autres associations, les services administratifs et les services municipaux concernés. Ils ont pour objectif de s’autonomiser et ont besoin pour cela d’une reconnaissance officielle.

La première étape était de fournir aux membres des CJA une formation aux méthodes d’IEC (information, éducation et communication) et de concevoir de nouvelles méthodes d’animation sanitaire, adaptées aux scolaires et aux adultes dans les quartiers.

Les CJA non scolarisés sont devenus un service social, mobilisant la population et répondant à sa demande. Leurs responsabilités essentielles étaient les suivantes : conseiller et sensibiliser le public en matière de santé, d’hygiène et d’environnement ; participer à des actions sanitaires de prévention ; veiller à la salubrité des quartiers périurbains de Sig-Noghin. Par ailleurs, des formations professionnelles ont été dispensées aux membres de ces CJA.

Les CJA avaient à assurer leur autofonctionnement à moyen terme, en cumulant des ressources liées à leurs activités et des dons. Les frais, engagés par les CJA scolaires, étaient à couvrir par les comités de parents d’élèves (CPE)


Freins à la réalisation du projet
La méthodologie prévisionnelle a évolué en fonction des contraintes et difficultés rencontrées :

  • le conseil d’administration des CJA non scolarisés ne comportait au départ que des adultes dont certains oubliaient l’idée d’entraide sociale ;
  • malgré une forte implication de la mairie de Sig-Noghin, la reconnaissance officielle des CJA a été longue ;
  • de nombreuses structures se sont impliquées dans la formation des jeunes animateurs non scolarisés, mais sans l’appui des centres de santé et de promotion sociale (CSPS) pourtant présents dans le quartier.

Ces difficultés successives se sont traduites par l’intégration de jeunes dans le conseil d’administration des CJA non scolarisés, par un rapprochement de ces CJA avec des associations de femmes, responsables de la distribution d’eau et de la collecte des ordures, à Sig-Noghin. De plus, tous les quartiers lotis n’ont pu bénéficier de l’ensemble des interventions prévues initialement, qui se sont concentrées dans les secteurs les plus défavorisés ou les moins salubres.


Bilan

Les éléments de réponse aux trois questions initiales sont les suivants :

-- Les CJA représentent-ils un moyen efficace et un relais nécessaire pour favoriser la sensibilisation à l'hygiène et assurer un suivi de proximité des populations ?

Les CJA ont acquis, peu à peu, la confiance d’associations locales avec lesquelles ils mènent des activités socio-économiques et sanitaires concertées. Il s’agit essentiellement des associations féminines qui ont aidé les plus jeunes à diffuser leurs messages et assisté les CJA lors de leurs causeries : débats avec les CSPS et aux points de regroupements (bornes-fontaines, marchés).

Tous les animateurs, jeunes et adultes, et les femmes partenaires, ont bénéficié de formations. Ils sont à même d’assurer la sensibilisation du public et le contrôle de la salubrité en milieu périurbain. En un an, quinze séances d’éducation sanitaire ont été organisées au profit de 4 000 habitants de Sig-Noghin ; ceci a permis une nette amélioration de l’hygiène domestique.

Suite aux interventions des CJA scolaires, on constate une amélioration de l’environnement sanitaire dans toutes les écoles de Sig-Noghin et un respect des règles de salubrité par les élèves. Le dynamisme des CJA a de plus été reconnu par la direction régionale de la Santé.

-- Des méthodes d'information, d'éducation et de communication (IEC) ayant pour cibles la consommation d'une eau potable, l'hygiène individuelle et collective et l'assainissement en milieu périurbain, peuvent-elles être conçues par les CJA ?

Les méthodes classiques d’éducation sanitaire s’adressent, en général, au milieu rural. La méthode MARP (méthode accélérée de recherche participative), qui permet de valoriser les connaissances et les savoir-faire des populations locales en tentant de les combiner avec les acquis récents, a été choisie pour le projet de Sig-Noghin. Mais, en raison de sa complexité, elle ne s’est pas avérée très satisfaisante en zone périurbaine investie par 50 000 habitants.

La conception et la validation d’une nouvelle méthode d’animation, mieux adaptée aux quartiers périurbains, satisfaisantes et acceptables par tous, paraissaient donc nécessaires. Cependant, dans le temps imparti au déroulement de l’action-pilote (moins de 18 mois), la méthodologie est demeurée incomplète. Les jeunes animateurs ont donc privilégié des techniques bien rodées en les aménageant selon les circonstances et la qualité du public.

-- Leur viabilité économique et leur insertion dans les structures institutionnelles et les communautés locales peuvent-elles être obtenues à court ou moyen terme ?

Les CJA ont maintenant un statut officiel reconnu par l’administration et la mairie. Ils font partie du comité sanitaire de district, en phase d’organisation, qui doit être un lieu de discussion et de concertation entre plusieurs partenaires : mairie de Sig-Noghin, CSPS, dispensaire, associations pour la salubrité publique et CJA.

En milieu scolaire, les CJA veillent à la propreté des locaux et de l’environnement et assurent la gestion des trousses de pharmacie ; 11 750 enfants et adolescents y ont bénéficié de sessions d’éducation sanitaire.

Les CJA ont trouvé des ressources pour assurer leur autofonctionnement, grâce à la fourniture de services, à la création de commerces et à la fabrication de PEP, dont les associations féminines partenaires assurent, aussi, la promotion.


Recommandations

La création, l’organisation et la réussite d’un programme CJA dépendent de plusieurs intervenants :

Les institutions

Les différents groupes représentatifs de la population et les institutions doivent être associés dans l’organisation du projet ; les bilans intermédiaires d’activités et de résultats doivent leur être transmis pendant toute la durée du programme. Une liste d’organismes et de personnes ressources doit être mise à la disposition des organisateurs du projet. Le souci majeur est de bénéficier de l’expérience déjà existante.

La confiance des institutions vis-à-vis des CJA est impérative, car elle facilite la phase de désengagement des organismes d’appui du projet, à son terme. Une attention particulière doit être portée à la constitution du conseil d’administration des CJA qui doit notamment impliquer les associations œuvrant dans les quartiers.

La population

Le succès d’un projet CJA va dépendre de la connaissance de la demande et des besoins de la population et de son implication dans les activités socio-sanitaires. Une enquête préalable doit donc être réalisée par des personnes expérimentées. Elle permettra de plus, en fin d’exercice, d’estimer l’impact réel des actions des CJA aux niveaux des familles, du milieu ambiant et de la vie sociale.

Les associations

La création de CJA sanitaires implique de renforcer la crédibilité des associations de quartiers pour en faire des partenaires et mieux garantir la viabilité du projet. Tout changement d’équipe, à court terme, est préjudiciable à la crédibilité des CJA et à leur efficacité, aussi il est demandé aux jeunes de participer aux activités sociales pendant, au moins, deux années. En retour, les organisateurs des programmes et les associations ont à veiller à leur insertion dans la vie économique locale.

Les outils et les stratégies de communication et de sensibilisation sont à réaliser avec les bénéficiaires - les habitants des quartiers - sous la conduite de professionnels. La formation de formateurs en éducation sanitaire, en milieu périurbain, est une mesure obligatoire. Les techniques d’animation à préconiser pour diffuser les messages, encore trop traditionnelles, doivent être améliorées. CJA et associations de femmes sont les meilleurs acteurs du développement sanitaire des quartiers, mais tout doit commencer à l’école, où se créent les bonnes habitudes et les meilleurs comportements.

En conclusion, les CJA assurent un lien social très important entre les générations et entre les différents groupes sociaux. Acteurs du développement, reconnus par la population, encouragés par les institutions, ils doivent cependant tirer de leur mobilisation des bénéfices. Il est très recommandé, dans un projet CJA, d’engager les jeunes animateurs sanitaires non scolarisés dans des formations professionnelles et de leur créer, dans les quartiers, des activités génératrices de revenus en lien avec le développement socio-sanitaire. C’est à ce prix, que peut être assurée la viabilité des CJA en milieu périurbain tropical.


» Contacts et fiche technique

Responsable de l’action pilote

Bruno Bonkoungou, EAST, s/c ORSTOM - BP 182 Ouagadougou - Burkina Faso - Tél./Fax : (226) 31 80 22
Loïc Monjour, EAST - 35 rue Broca - 75005 Paris - France -
Tél. : (33) (0)1 43 26 12 08 - Fax : (33) (0)1 43 29 70 93

Partenaires

Alain Kaboré
Khémaïs Farhati
Le ministère de la Jeunesse et des Sports
Le ministère de l’Enseignement de base
et de l’Alphabétisation
Le ministère de la Santé
La mairie centrale de Ouagadougou
La mairie d’arrondissement de Sig-Noghin
L’inspection de l’enseignement primaire
Le district sanitaire
La DESHA
Le CREPA
L’ONEA

Localisation : quartier Sig Noghin de Ouagadougou, Burkina Faso
Axe(s) de recherche concerné(s) : 3.1
Milieu d’intervention : quartier périurbain
Durée : 18 mois (10/06/96 – 31/12/97)
Coût : 430 324 FF



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