retour imprimer © Lettre du pS-Eau 55 de Oct 2007

Coopération décentralisée Yen Baï / Val-de-Marne

Des bords de Seine au fleuve Rouge, gestion de l'eau et environnement


A Yen Baï, la question de la qualité de l'eau est au centre de la politique de santé de la province.
©DA KT

Depuis une dizaine d'années, la province de Yen Baï et le département du Val-de-Marne développent une coopération décentralisée active dans le secteur de l'eau. Ce partenariat technique et institutionnel confirme l'importance d'une approche intégrée des problématiques de l'eau potable et des eaux usées, et la nécessaire formation des acteurs à la bonne appréhension des enjeux environnementaux en présence.

La province de Yen Baï est située au nord du Vietnam, à 183 kilomètres au nord-ouest de Hanoï. La population totale de la province s'élève à 700 000 habitants, répartis sur 7 districts. La ville de Yen Baï compte plus de 80 000 habitants.

A Yen Baï, la question de la qualité de l'eau est au centre de la politique de santé de la province. Comme ailleurs au Vietnam, plusieurs facteurs de pollution des ressources en eau se conjuguent. L'usage de pesticides en agriculture, l'activité industrielle et l'urbanisation croissante, l'absence de traitement des eaux usées avant leur rejet dans le milieu naturel, tout cela entraîne une pollution des nappes souterraines, des cours d'eau et des lacs, en premier lieu les eaux du fleuve Rouge, qui traverse la province. Cette situation est à l'origine de nombreuses maladies au sein de la population (hépatites, malaria, goitres, diarrhées, notamment chez les nourrissons).

C'est en 1995 que le conseil général du Val-de-Marne et la province de Yen Baï on débuté leurs relations privilégiées. Une première convention de coopération décentralisée a été adoptée en décembre 1999, sur la base d'un programme d'amélioration des conditions sanitaires des habitants de la province, prévoyant des travaux de rénovation de l'hôpital provincial : alimentation et distribution de l'eau potable, traitement des déchets hospitaliers, mise en place des réseaux de collecte des eaux usées, avec la participation financière du ministère français des Affaires étrangères et de l'Agence de l'eau Seine-Normandie.

Cette première phase s'est accompagnée de dotation en matériels (réservoirs, containers, transformateur, groupe électrogène, etc.) et de formations dans le domaine de l'hygiène et du traitement des déchets. Ce programme aboutit en 2003 à la mise en service d'une station d'épuration – la première installation de ce type dans les provinces rurales du Nord Vietnam – et d'un incinérateur pour le traitement des déchets hospitaliers.

A partir de 2001, un projet européen, Asia Urbs, a permis aux deux collectivités partenaires d'élargir leurs activités de coopération à toute la province, avec l'objectif d'améliorer les conditions sanitaires à travers les domaines de l'eau, de la santé et de l'environnement. Ce projet a permis de doter cinq hôpitaux et dispensaires en installations de potabilisation de l'eau, d'assainissement et de traitement des déchets.

Au terme de ces actions, qui ont concerné au total 6 structures de santé de la province, la démarche de coopération décentralisée entre le conseil général du Val-de-Marne et le Comité populaire de la province de Yen Baï est parvenue à un niveau avancé de réalisation des projets. Les deux collectivités ont donc conduit une évaluation globale de leur partenariat de coopération, et ont adopté au mois de mai 2006 une nouvelle convention-cadre de coopération décentralisée (2006-2009), dans une double perspective de renforcement de l'expérience acquise dans les domaines de l'eau, de la santé et de l'environnement, et de diversification des thématiques de coopération.
Dans le cadre de ce partenariat renouvelé le projet «adduction d'eau potable, assainissement et appui institutionnel à la gestion du service de l'eau» a été conçu. Il a été proposé par la collectivité vietnamienne sur la base de deux orientations : satisfaire d'une part, un besoin élémentaire d'approvisionnement en eau potable et conduire ainsi à une amélioration des revenus et des conditions de vie sanitaire et sociale des habitants ; accompagner d'autre part, la montée en compétence et en responsabilité des cadres vietnamiens issus des services provinciaux et des entreprises locales, dans leur capacité à réaliser et à gérer des infrastructures importantes dans le domaine de l'eau et de l'assainissement.

Mettre en place des politiques publiques à l'échelle de la province
Prévu pour une durée d'un an, le volet «eau–assainissement–environnement» prévoit différentes actions :
Un premier objectif vise la réalisation d'infrastructures de captage, de potabilisation, et de distribution de l'eau potable dans les communes de An Thinh (2200 bénéficiaires) et Yen Phu pour (2500 bénéficiaires). Ce projet vise à améliorer les conditions sanitaires et un meilleur développement socioéconomique des populations. Dans les deux localités, le besoin journalier en eau est estimé à 100 litres/jour/habitant.
Le prix de l'eau a été établi à partir de consultations menées auprès des populations des deux communes pendant la phase d'élaboration des projets de faisabilité. L'évaluation de la «capacité des bénéficiaires à payer l'eau» a permis d'établir un tarif à 1500 VND par m3 (0,07 e), soit moins de la moitié du tarif appliqué pour le réseau de la ville de Yen Baï. Sur la base de ce tarif, les populations souhaitant bénéficier de ce service ont donc fait l'objet d'une inscription formelle de manière à comptabiliser le nombre total de bénéficiaires et finaliser la configuration définitive du réseau. Au-delà des charges induites, le plan de financement type pendant une année d'exploitation pour chacune des deux installations d'adduction prévoit un excédent qui sera dédié pour une première part à la réparation des pannes importantes, pour une deuxième part à l'entretien des systèmes d'assainissement, et pour une troisième part, à la constitution d'une réserve budgétaire en vue de réaliser ultérieurement des extensions de réseaux.

Un deuxième objectif vise la réalisation d'infrastructures d'assainissement des principaux bâtiments publics de la commune de An Thinh, pour améliorer l'hygiène et les conditions sanitaires à proximité des points d'eau collectifs et ainsi diminuer les facteurs locaux de pollution du milieu naturel, contribuer à préserver durablement la ressource en eau et améliorer durablement la santé publique.
Les principaux bâtiments publics – un dispensaire, une école maternelle et primaire, un collège et un lycée – situés en zone centrale de la commune seront raccordés par un réseau de collecte et de transport des effluents à un système de traitement des eaux usées de type massif d'épandage filtrant sur sable et drainé en fond de massif étanche. Après traitement, les eaux épurées seront rejetées dans le milieu naturel. Les eaux usées produites par chaque bâtiment public seront préalablement liquéfiées et prétraitées sur place dans une "fosse toutes eaux" étanche. Des sanitaires seront créés dans l'école, le collège et le lycée et disposeront de points de distribution d'eau potable. Les solutions techniques retenues sont conformes aux normes européennes et vietnamiennes en matière d'assainissement semi-collectif autonome. Ces solutions de traitement des eaux usées ont déjà été développées par le Conseil général et le Comité populaire sur des sites pilotes à l'occasion du programme Asia Urbs.
Les solutions techniques retenues en matière d'adduction d'eau potable comme pour l'assainissement sont déjà opérationnelles dans la province. Le nouveau projet bénéficie donc d'expérience et de savoir-faire acquis dans le cadre de projets antérieurs de coopération décentralisée.

Un troisième objectif concerne la mise en œuvre d'un programme d'appui institutionnel à la maîtrise d'ouvrage, ainsi qu'à l'organisation et à la gestion du service de l'eau à travers des formations de cadres et des échanges de compétences.
En parallèle à ces trois objectifs, il s'agira d'intégrer les infrastructures de l'eau et de l'assainissement liées au projet ou présentes sur le territoire de la province dans une démarche de développement global, durable et maîtrisé par l'ensemble des acteurs concernés : usagers, acteurs publics et privés intervenant dans les domaines de l'eau et de l'assainissement. Il s'agira également d'améliorer les capacités des cadres vietnamiens issus des services provinciaux et des entreprises locales à réaliser et à gérer des infrastructures importantes dans le domaine de l'eau et de l'assainissement. A ainsi été proposée la mise en place d'un plan global de renforcement des capacités de réalisation et de gestion des infrastructures eau et assainissement. Ce plan comprend trois volets principaux :
– une assistance technique fournie par le conseil général du Val-de-Marne à la collectivité et aux cadres vietnamiens concernés par la maîtrise d'ouvrage déléguée ou par la maîtrise d'œuvre locale du projet. Cet accompagnement se déroulera pendant la phase de conception technique du projet ainsi que pendant la phase des travaux. Au terme des douze mois prévus pour la réalisation du projet, à partir de l'entrée en fonction des installations, ce dispositif se prolongera dans le cadre des actions régulières de coopération décentralisée ;
– un dispositif de formation et de conseil auprès des agents d'exploitation et des cadres locaux chargés du suivi du projet : membres des comités d'exploitation et d'entretien issus des deux communes, membres des comités populaires des deux communes, membres du comité de gestion des projets du district, et éventuellement des autres opérateurs techniques locaux. Ce dispositif est tout particulièrement dédié à la mise en place durable du service de proximité de l'eau dans les deux communes et à l'acquisition des compétences nécessaires à l'exploitation permanente des infrastructures : entretien courant et préventif/maintenance/ renouvellement ; gestion technique ; gestion administrative ; gestion financière ;
– un dispositif de sensibilisation à l'hygiène, aux usages de l'eau et à l'environnement à destination des populations des deux communes. Ce dispositif est élaboré par la collectivité vietnamienne partenaire en lien avec les agents d'exploitation, les cadres locaux chargés du suivi du projet ainsi que les personnels affectés aux bâtiments publics (groupes scolaires, dispensaires) présents sur les deux communes.

Cette double approche développement des infrastructures et appui institutionnel met en relief la complémentarité des actions proposées dans le cadre du projet. Ainsi, la démarche défendue est à vocation structurante pour accompagner de façon globale le développement institutionnel de la province de Yen Baï, tant du point de vue des compétences, que de celui des capacités à fournir des services de proximité de qualité.

Synergie et complémentarité des actions avec d'autres projets
La complémentarité de ce projet avec l'action de coopération française au Vietnam s'exprime à travers trois domaines prioritaires de son intervention :
• le développement des infrastructures. Le projet concerne particulièrement le secteur de l'eau et de l'environnement où les besoins du Vietnam demeurent importants en terme de réalisation et de capacité de gestion des infrastructures dans le domaine de l'eau potable et des eaux usées ;
• le développement rural. Du fait de l'amélioration escomptée de la gestion de la ressource en eau, le projet doit permettre une amélioration des conditions sanitaires et sociales de la population concernée. Il contribuera également à développer l'économie rurale dans le district par une amélioration de l'activité agricole et d'élevage ;
• la formation des ressources humaines. Sur la base de l'expertise du Val-de-Marne, le projet est orienté autour d'un axe de renforcement des compétences des cadres des acteurs publics et privés provinciaux appelant une montée en responsabilité des partenaires vietnamiens. Cet axe inscrit le projet en parfaite cohérence, d'une part, avec les politiques publiques menées par les différents niveaux d'autorité administrative de la province, et d'autre part, en tenant compte des capacités techniques des acteurs privés : entreprises de travaux, fournisseurs et bureaux d'études.

Le projet s'inscrit également dans la continuité d'une politique de développement des infrastructures de l'eau et de l'assainissement dans la province. Outre les projets de coopération évoqués précédemment concernant les structures de santé, des projets similaires d'adduction d'eau ont déjà été conduits par le Comité populaire de la province. Ainsi, dans la commune de Tân Thinh, située dans le district de Van Chan, la collectivité vietnamienne a mis en service en 2005 une unité de potabilisation par système gravitaire et par filtration rapide d'une capacité de 20 m3/h. Le réseau de distribution s'étend sur 4 km alimentant 700 foyers, soit près de 2500 habitants. La gestion est menée sous forme de coopérative municipale avec l'emploi de deux agents d'exploitation. Le coût du projet s'est élevé à 70 000 euros, financés par l'Etat vietnamien, le Comité populaire de la province, la coopérative municipale, avec le soutien de l'Unicef.

Enfin, le département du Val-de-Marne détient une expérience de collaboration avec le laboratoire du Centre provincial de prévention de la santé, élément majeur du dispositif de prévention et de protection de la santé publique au niveau de la province. Un travail est effectué depuis plusieurs années avec celui-ci pour développer ses compétences dans les domaines de l'eau potable et des eaux usées (fourniture de matériel d'analyse, de produits consommables, formation des personnels in-situ, accueil de stagiaires en France au Laboratoire des eaux du Val-de-Marne, etc.).

Des bords de la Seine aux rives du fleuve Rouge, la démarche engagée, prend appui sur une expérience significative des autorités et des entreprises présentes sur le territoire de la province vietnamienne. Elle permettra également de capitaliser, de valoriser et de renforcer l'ensemble des savoir-faire acquis par les partenaires vietnamiens dans le domaine de l'eau et de l'assainissement.


Partenaires sollicites pour l'eau et l'assainissement
Ministère des Affaires étrangère et européenne : 12 500 €
Le Syndicat intercommunal pour l'assainissement
de l'agglomération parisienne : 75 000 €
L'Agence de l'eau Seine-Normandie : 90 000 €
Conseil général du Val-de-Marne : 252 000 €
Comité populaire de la province de Yen Baï :
Comité populaire du district de Van Yen, Comités populaires
des communes de An Thinh et Yen Phu, Centre provincial
de prévention de la santé et son laboratoire 48 000 €
Coût total du projet : 477 500 €


Le Conseil général du Val-de-Marne et la coopération décentralisée
Le Conseil général du Val-de-Marne met en œuvre des actions de coopération décentralisée avec différentes collectivités à travers le monde : la commune de Jucuaran et les départements de Usulutan et Ahuachapan au Salvador, les villes de Jénine, Qalqilya et Tulkarem dans les Territoires palestiniens, la province de Yen Baï au Vietnam, la commune urbaine de Zinder au Niger, et la ville de Johannesburg en Afrique du Sud.
Dans leur ensemble, ces coopérations portent principalement sur les questions de l'eau, de l'hygiène et de la santé, l'éducation et la petite enfance, la culture et le patrimoine, et le développement rural.
www.cg94.fr/international


Daniel Alarçon
Conseil général du Val-de-Marne - Direction des Affaires européennes et des Relations internationales
T. 01 43 99 72 16
Email:
daniel.alarcon@cg94.fr
Site internet: www.cg94.fr/international

CD 94 - Créteil - France
 

Station d'épuration de l'hôpital de Yen Baï.
©DA KT

Un des objectifs concerne l'appui institutionnel
à la maîtrise d'ouvrage, ainsi qu'à l'organisation et à la gestion du service de l'eau à travers la formation de cadres et les échanges de compétences.
STEP de l'hôpital de Yen Baï ©DA KT
 

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