retour imprimer © Lettre du pS-Eau 93 de Jul 2021

Ethiopie: Une association au service des personnes défavorisées en zone rurale


Puits aménagé et équipé de pompe à main à Durgué [© Avec l’Ethiopie]

Dans la zone de Debré Tabor, les services publics sont défaillants faute de moyens financiers des collectivités locales, L'association Avec l'Éthiopie contribue à résorber les nombreux besoins exprimés.

L'association « Avec l'Ethiopie » créée en 2011 à Angers s'est donnée au départ plusieurs objectifs : faire connaitre l'Ethiopie en France, favoriser les échanges entre l'Ethiopie et la France, aider des collectivités éthiopiennes à améliorer les conditions de vie des personnes défavorisées et des jeunes.

Après concertation en Ethiopie, il a été choisi en 2013 de travailler avec la ville de Debré Tabor (140 000 habitants) située au nord du pays et avec la collectivité couvrant les zones rurales – le Farta Wereda (250 000 habitants). L'association a ainsi rapidement signé des conventions de coopération avec ces deux collectivités.

Depuis 2013, un volontaire de solidarité internationale français est missionné sur place pour suivre les projets et représenter l'association. Il est désormais appuyé par une jeune fille en service civique. Ils travaillent avec un technicien éthiopien et une traductrice. Au niveau financier des comptes bancaires communs, entre l'association et les collectivités garantissent la transparence de l'utilisation des fonds.

Plusieurs projets ont été réalisés durant la période 2013-2016. Fin 2016, l'activité a dû s'interrompre du fait de troubles sécuritaires dans le pays. Mais fin 2018, l'association a pu reprendre ses activités avec un VSI et un service civique sur place et réactualisé les conventions de coopération.

L'association, en accord avec les deux collectivités, travaille dans 4 domaines :
• L'alimentation en eau potable des villages ruraux sur la zone du Farta Wéréda.
• La mise en place de toilettes collectives écologiques Ecosan dans les quartiers défavorisés de la ville de Debré Tabor.
• La rénovation d'une école rurale de 800 élèves (350 primaires et 450 collégiens) située à 4 km de Debré Tabor (eau, électricité, amélioration des classes anciennes, jardin pédagogique, construction d'une nouvelle salle d'activité).
• L'aide à l'équipement sportif d'équipes de jeunes jouant au football (50 filles de 12 à 17 ans).

Le réseau public de la ville de Debré Tabor

La ville de Debré Tabor a pour ses 140 000 habitants un réseau public alimenté par un champ captant situé à 5 km de la ville avec une nappe à 150 m de profondeur.
Actuellement les quantités d'eau arrivant dans la ville sont insuffisantes pour assurer une alimentation permanente. En fait, la nappe est insuffisante pour assurer l'alimentation d'une ville qui s'agrandit très rapidement. Certaines pompes immergées sont par ailleurs endommagées du fait de leur utilisation intensive et en l'absence de maintenance et réparation. Les services techniques de la ville sont en difficulté pour gérer un tel réseau qui manque de compteurs et pour proposer des solutions à long terme.

La situation est la même à l'université avec 12 000 élèves dont la plupart logent en cité universitaire. Cet ensemble dispose d'un réseau dédié avec ses ressources propres, mais il connaît aussi de grandes difficultés de fonctionnement à différentes périodes de l'année.
La ville et l'université souhaiteraient un soutien par des spécialistes français pour un premier diagnostic global de la ressource et du réseau. Il y aurait une option d'aller chercher de l'eau à 25 km ce qui est irréaliste au niveau financier.
L'association ne pourrait sans doute pas porter directement ce dossier complexe, mais souhaite mobiliser d'autres partenaires français, notamment pour organiser une mission d'expertise technique de diagnostic.
Une action a été menée cette année pour raccorder des maisons abritant 2000 personnes relevant de l'habitat social sur le réseau public et éviter l'utilisation de ressources polluées.

L'eau dans les villages ruraux du Farta Wereda

L'action de l'association se concentre sur la mise en place de points d'eau collectifs dans les villages ruraux autour de la ville.

Ce sont souvent des petits villages d'agriculteurs qui regroupent entre 80 et 120 habitants soit une vingtaine de familles. On est en montagne à 2700 m d'altitude. Il pleut 1500 mm du mois de juin à septembre. On trouve donc dans le sous-sol des filets ou nappes d'eau qui émergent à flanc de coteau. Les femmes ou les jeunes filles vont ou allaient chercher de l'eau dans des sources ou rivières éloignées du village et dont la qualité n'est pas garantie. Ces transports se faisaient au détriment de leur santé, notamment au niveau des hanches.
Les nombreux villages autour de la ville expriment leurs besoins à l'administration qui après étude avec notre association fixe une liste de villages prioritaires pour l'année en cours ou les années futures. La liste d'attente est longue.

Dès que la décision est prise pour un village et que les financements sont assurés, le service technique du Farta avec les villageois fixent le site d'implantation du puits à proximité des habitations. Ce sont en général les villageois qui creusent le puits de 1,50 m de diamètre et de 15 à 20 m de profondeur. Quand ils ont trouvé de l'eau en quantité suffisante, il y a intervention d'un artisan qui fabrique sur place les cylindres qui serviront de parois du puits. Il met également en place la pompe à main et la tête de puits. Le coût d'un puits de ce type est de 3000 euros.
Depuis 2020, le bureau de l'eau du Farta a proposé des puits plus profonds (60 à 80 m) pour les gros villages de 600 habitants. Il y a dans ce cas intervention d'une foreuse. La pompe immergée est manuelle ou électrique alimentée soit par le réseau soit par des panneaux solaires. Le coût avec pompe à main est de 12 000 euros à 14 500 euros. Pour un puits avec pompe électrique et réservoir, c'est plutôt 55 000 euros.

La gestion du puits est assurée par un comité de gestion de 5 personnes du village qui suivent en amont une formation de quelques jours. Ce comité gère la cagnotte issue de la contribution des familles. Le service de l'eau du Farta assure les réparations des pompes si nécessaires.

Durant la période 2013–2016 ce sont 10 points d'eau qui ont été réalisés pour 10 villages soit 1200 personnes.

En 2019–2020, il a été possible de réaliser 10 autres points d'eau pour 800 personnes dans les petits villages, un point d'eau pour un gros village de 600 personnes et un point d'eau avec réservoir et robinets pour les 800 élèves de l'école de Tsagur. En 2021, des travaux sont en cours dans 7 petits villages pour 600 personnes et un point d'eau dans un gros village de 1500 personnes.

Les financements pour ces programmes d'accès à l'eau proviennent de l'agence de l'eau Loire Bretagne, du conseil régional Pays de la Loire, de la métropole de Lyon et de quelques syndicats d'eau de la région Pays de la Loire.

De nouveaux financements des collectivités ou des syndicats d'eau français permettraient de répondre en 2022 aux besoins des nombreux villages sur la liste d'attente.

Les actions dans le domaine des latrines

L'équipement en latrines des maisons dans la ville de Debré Tabor est un problème majeur d'environnement et de santé. Ceci est d'autant plus critique dans les groupes de maisons sociales appartenant à la mairie et où logent les personnes défavorisées, appelées les maisons des kébélés (30 à 60 personnes).

L'association en accord avec la mairie de Debré Tabor a opté pour la technique collective écologique Ecosan qui a l'avantage de séparer les solides des liquides et de permettre une valorisation agricole des déchets, dans une région où l'agriculture utilise très peu d'amendements minéral ou organique.

Sept maisons des kébélés représentant 350 habitants ont ainsi été équipées en latrines communautaires Ecosan. Après différents essais sur plusieurs cultures, l'option choisie a été l'épandage des urines et des fèces sur les terrains agricoles de grandes cultures du Farta Wereda. Cet épandage est suivi par des techniciens agricoles du Farta.
La mise en place de cet équipement est accompagnée d'une campagne de prévention sur l'hygiène et notamment sur le lavage des mains.

Les perspectives

En plus des actions prioritaires dans le domaine de l'eau qui vont continuer, l'association va poursuivre les travaux de rénovation de l'école de Tsagur School, où deux classes sont en échanges scolaires par lettres en anglais, dessins, photos et vidéos avec des écoles de la région d'Angers. L'équipement en matériel d'équipes de football de jeunes filles (maillots, shorts, ballons et chaussures) va être poursuivi. L'association souhaiterait engager prochainement un diagnostic agraire sur 4 villages en vue de proposer aux agriculteurs des actions pour améliorer leur revenu actuellement très faible.

Une autre action en cours d'études avec les services de santé locaux concerne la protection périodique des femmes et des jeunes filles à Debré Tabor sujet tabou, mais où il peut y avoir des marges de progrès pour la santé et la vie des femmes notamment des étudiantes et des collégiennes.
Tous les travaux déjà réalisés depuis 8 ans ont permis d'améliorer les conditions de vie et la santé de plusieurs centaines d'habitants. Pour cette raison, enrichie des premiers résultats encourageants obtenus, Avec Ethiopie, poursuit ce programme crucial pour donner de l'eau potable et des toilettes à des personnes défavorisées en partenariat avec les services techniques locaux compétents. Le souhait partagé avec les collectivités éthiopiennes serait de travailler prochainement plus étroitement avec des collectivités françaises en soutien technique, mais aussi en concertation et dialogue entre élus.


Bernard Piriou
Avec l’Ethiopie
Email:
aveclethiopie@laposte.net
Site internet: www.aveclethiopie.org

AE Loire-Bretagne - Orléans - France
Avec l'Ethiopie - Angers - France
 

Latrine Ecosan pour les habitant d’un Kébélé [© Avec l’Ethiopie]

Porteuses d’eau [© Avec l’Ethiopie]
 

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