retour imprimer © Lettre du pS-Eau 90 de Oct 2019

De Dakar à Stockholm : retours sur les réunions internationales


Lancement du processus préparatoire du 9e Forum mondial de l’eau Dakar 2021. [© pS-Eau]

Une réunion de lancement (aussi appelée « Kick off meeting ») du processus préparatoire du 9e Forum mondial de l'eau qui aura lieu à Dakar en 2021, s'est tenue les 20 et 21 juin 2019. Le pS-Eau y a participé afin de poursuivre son implication dans le processus des Forums mondiaux, tout particulièrement sur le thème de l'assainissement.

Le kick off meeting a été ouvert par le ministre de l'Eau et de l'Assainissement du Sénégal, Serigne Mbaye Thiam, et le président du Conseil mondial de l'eau, Loïc Fauchon. La rencontre s'est clôturée avec le même ministre sénégalais et son homologue du Kenya, Simon Chelugi.

670 personnes ont participé, dont 211 originaires de 53 pays étrangers et 459 Sénégalais issus de secteurs variés (décideurs politiques, universitaires, membres d'organisations internationales, représentants de la société civile et du secteur privé).

Des axes majeurs ont été retenus pour le 9e Forum, dont le thème est « La sécurité de l'eau pour la paix et le développement durable » :
• Une forte tonalité africaine ;
• Un portage par les autorités politiques : un sommet des chefs d'État sera notamment organisé à cette occasion ;
• Un forum « catalyseur » pour l'atteinte des ODD.

Cette réunion, qui constituait la première consultation large pour l'organisation du Forum, a permis de rappeler les objectifs et d'ouvrir le débat sur le contenu des quatre axes thématiques retenus : (I) Sécurité de l'eau, (II) Eau et développement rural, (III) Coopération et (IV) Outils et moyens (gouvernance, financement, connaissance, innovation).

Des travaux en sous-groupes ont permis de faire ressortir les contenus à approfondir pour chacun de ces thèmes. Le pS-Eau a tout particulièrement contribué aux travaux sur le thème « Eau et développement rural » en veillant à ce que les problématiques liées aux services d'eau et d'assainissement dans les petites villes y soient considérées, ainsi que sur le thème « Outils et moyens ».

Outre le kick off meeting, plusieurs rencontres parallèles se sont tenues cette même semaine, notamment :
• Les 18 et 19 juin : réunion du board du Conseil mondial de l'eau ;
• Du 18 au 22 juin : réunion du collectif des organisations de la société civile du secteur de l'eau et de l'assainissement en Afrique de l'Ouest et du centre (Alliance d'Afrique francophone pour l'eau et l'assainissement – AAFEA). Le pS-Eau a pu participer à la journée de synthèse des travaux de ce groupe ;
• Le 19 juin : réunion des jeunes professionnels de l'eau.

Semaine mondiale de l'eau 2019 : l'inclusion en question

Chaque année en août, la Semaine mondiale de l'eau de Stockholm représente une réunion de rentrée importante pour rencontrer de nombreux acteurs du secteur de l'eau et l'occasion de partager expériences et pratiques entre professionnels. Cette année, la conférence a réuni près de 4 000 personnes issues de plus de 1 000 organisations, autour du thème « L'eau pour la société : inclure tout le monde ». Le pS-Eau était pleinement mobilisé et a co-porté deux sessions durant la semaine, l'une portant sur l'assainissement dans les petites villes et la seconde sur les services d'eau et d'assainissement et le changement climatique. Nous proposons ici un retour sur quelques thématiques abordées pendant la conférence, dont celles de nos sessions.

L'inclusion : un objectif partagé mais des progrès trop lents
Compte tenu du thème directeur de la semaine, de nombreuses sessions ont débattu des questions d'inclusion. Ce sujet global recouvre en réalité de nombreuses problématiques spécifiques. Le rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l'eau potable et à l'assainissement, Léo Heller, a ainsi rappelé que l'objectif de « ne laisser personne de côté » issu des Objectifs du développement durable s'appuie sur les cinq critères définis par le Droit humain à l'eau et à l'assainissement : la disponibilité, la qualité, l'accessibilité, l'acceptabilité et le caractère abordable des services.
L'accès à l'assainissement représente un volet particulièrement sensible aux questions d'inclusion. L'accessibilité et la gestion des toilettes posent par exemple des enjeux en termes de :
• Disponibilité : l'accès doit être possible en tous lieux, à domicile mais également dans les écoles, les lieux institutionnels et les espaces publics. Certains espaces, comme les prisons, sont actuellement encore négligés bien que les besoins soient importants ;
• Sécurité de l'accès et intimité : l'accès doit être sécurisé pour les personnes vulnérables et respecter l'intimité et la dignité des utilisateurs et utilisatrices ;
• Conception des infrastructures : les toilettes doivent être adaptées, par exemple pour l'accès des personnes en situation de handicap, mais également pour répondre aux besoins liés à la santé menstruelle ;
• Gestion : par exemple, la gestion de la santé menstruelle peut engendrer des besoins spécifiques de gestion des déchets.
Il importe d'évaluer précisément les besoins auprès des personnes concernées. Une intervenante relevait ainsi qu'une opération mal adaptée peut créer involontairement de nouvelles barrières : physiques (conception ou design des infrastructures), sociales (pauvreté), institutionnelles ou économiques. L'accès des toilettes aux personnes transgenres est ainsi un exemple délicat, où la non-mixité pose problème alors même qu'elle respecte mieux l'intimité des femmes et des filles.
De façon similaire, une attention particulière est nécessaire sur les enjeux d'intersectionnalité, c'est-à-dire vis-à-vis des barrières additionnelles qui touchent les personnes cumulant plusieurs types de discrimination. Ainsi, les personnes handicapées sont encore plus vulnérables lorsqu'elles sont des femmes.

Enfin, une problématique connexe qui a été souvent relevée concerne le besoin d'avoir des données sociales précises et en quantité suffisante pour aborder les enjeux d'inclusion. En effet, la première préoccupation est de pouvoir identifier les personnes en situation de vulnérabilité, afin de mieux connaître et évaluer leurs besoins spécifiques en termes d'accès dans un second temps. Au-delà d'avoir des indicateurs spécifiques, il est aussi important d'effectuer un suivi de ces données dans le temps. Pour des exemples d'indicateurs, on pourra consulter la nouvelle « Trousse à outils pour l'évaluation et le suivi de données sur l'eau ventilées par genre », développée par le Programme mondial pour l'évaluation des ressources en eau (UNESCO WWAP).

Les sessions du pS-Eau

Lors de cette semaine, le pS-Eau a co-porté deux sessions, chacune réunissant une centaine de personnes.

Assainissement dans les petites villes
Faisant suite à des sessions antérieures, le pS-Eau, la Banque mondiale, Eawag-Sandec, GIZ, SuSanA et WaterAid ont organisé une session sur l'assainissement dans les petites villes. Pour encourager le partage d'expériences, qu'elles aient été des réussites ou non, cette session a débuté par une animation sous la forme d'un jeu télévisé adapté du projet FSM Fail. Deux équipes d'experts se sont affrontées et étaient invitées à donner leur avis sur des exemples d'échecs : les exemples étaient-ils réels ou fictifs ? Ce jeu a rappelé la nécessité de mieux partager nos expériences et capitaliser sur nos échecs comme nos réussites ; en particulier pour les petites villes. Dans ces contextes, de nombreux projets qui ont échoué ont, par exemple, surestimé la demande en assainissement ou bien sous-estimé la capacité du secteur à assurer des services viables de collecte et de transport des excreta. Des exemples concrets d'échecs ont cité : l'absence de services de vidange alors même qu'une station de traitement a été construite, des stations de traitement qui fonctionnent en sous-capacité, des camions vidangeurs non utilisés car la demande est insuffisante, etc.
Dans la deuxième partie de la session, les participants ont été invités à se joindre à des groupes de discussion pour débattre des échecs et des défis spécifiques de l'assainissement dans les petites villes, sur la base d'études de cas.

Services d'eau et d'assainissement face au changement climatique
Le pS-Eau, DFID, GWP, OMS et WaterAid ont animé une session intitulée « Les services d'eau et d'assainissement sont-ils prêts pour faire face au changement climatique ? », avec la participation des Universités de Leeds et d'Oxford.
Cette session visait à mettre la lumière sur les risques qui pèsent sur les services d'eau, d'assainissement et d'hygiène (EAH) dans un contexte de changement climatique. Les aléas climatiques peuvent directement impacter le secteur EAH : diminution de la disponibilité des ressources en eau alors même que la demande en eau augmente, dommages sur les infrastructures (inondations impactant les équipements électriques, par exemple), etc. Ces impacts affectent à leur tour l'accès au service et leur qualité et augmentent les risques sanitaires associés aux maladies hydriques.
L'adaptation aux risques climatiques nécessite donc une évaluation systémique de la vulnérabilité des services, à tous les niveaux opérationnels : des évaluations au niveau national seront utiles pour identifier les domaines prioritaires, quand les évaluations au niveau local sont nécessaires pour définir les actions et priorités opérationnelles.
Trois expériences montrant l'utilisation d'outils d'évaluation des risques climatiques ont été présentées durant la session :
(i) la mise en place d'évaluations participatives de la vulnérabilité climatique au niveau de quartiers urbains au Bangladesh,
(ii) de plans de sécurité de l'eau résilients au climat en Ethiopie et
(iii) le développement de modèles pour évaluer la contribution des systèmes d'assainissement aux émissions de gaz à effet de serre au Kenya.

Les comptes rendus détaillés des sessions sont à retrouver sur : www.pseau.org/fr/semaine-mondiale-leau-stockholm



Rendez-vous internationaux à venir
• IWA Water and Development Congress
5 décembre 2019
www.waterdevelopmentcongress.org
• COP25 à Santiago, Chili
2–13 décembre 2019 / www.cop25.cl
• 20e Congrès de l'Association africaine de l'eau (AAE/AfWA), à Kampala, Ouganda
24–27 février 2020 / afwa2020.org


Initiative Dakar 2021
Durant le Kick Off Meeting, le Sénégal a annoncé le lancement de l'« Initiative Dakar 2021 » (i2021). L'objectif de l'i2021 est le développement de projets concrets, dont les résultats seront présentés lors du Forum mondial de l'eau et qui permettront d'encourager une dynamique d'engagement, à travers des projets labellisés à fortes réponses socio-économiques. Cette initiative vise à engager d'ici mars 2021 :
• 2021 nouvelles localités ou structures munies d'un accès sécurisé à l'eau potable et/ou à l'assainissement : communautés, écoles, par région du monde ;
• 2021 professionnels de l'eau formés, incluant les jeunes et les femmes ;
• 2021 nouveaux accès à l'eau potable, à l'assainissement et à l'eau agricole pour des collectivités, par organisation transfrontalière ;
• 1 nouveau protocole pour bassins transfrontaliers ;
• la création d'un Fonds mondial de l'eau (Fonds Bleu).
Un appel à projets sera lancé fin 2019 à l'attention des acteurs nationaux, régionaux et internationaux, qu'ils soient des organismes publics, parapublics ou privés, exerçant une activité en relation avec l'une des quatre thématiques majeures du forum.


Colette Genevaux
Email:
genevaux@pseau.org

CME - Marseille - France
SIWI - Stockholm - Suède
 

L’animation « jeu télévisé » pour la session sur l’Assainissement dans les petites villes [© pS-Eau]
 

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