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Recherches n°3 : Analyse des paramètres économiques de la distribution d’eau pour les populations à faibles revenus des quartiers périurbains et des petits centres en Afrique

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Le titre de la recherche figurant ci-dessus est un titre synthétique. L’intitulé contractuel précis comprend deux parties distinctes :

  • " Outils d’évaluation directe de la demande pour les services améliorés de la distribution d’eau potable " ;
  • " Fonctions de coût de divers systèmes d’approvisionnement collectifs en eau potable dans les quartiers périurbains et les centres secondaires ".

Objectif et méthodologie de la première partie

Objet : Étudier la fonction de la demande des populations des centres secondaires et des quartiers périurbains pour des services améliorés d’approvisionnement en eau potable (points d’eau collectifs payants, branchements particuliers, livraison-portage à domicile). En déduire des outils opérationnels pour sa prévision dans le cadre des études d’avant-projet et élaborer des recommandations pratiques pour la mise en œuvre de ces outils.

Les déterminants de la demande domestique dans les quartiers périurbains et les petits centres ont été étudiés selon une double approche : d’une part à travers les études de cas fournies par la littérature technique, et en particulier par les travaux de la Water Research Team de la Banque mondiale ; d’autre part à partir des données d’enquêtes ex post réalisées sur un ensemble varié de quartiers urbains et de petits centres (Niger, Guinée, Bénin, Mali) par le CERGRENE et le BURGEAP, dans le cadre d’un programme de recherche commun subventionné par le ministère de la Coopération.

Sur la base des mêmes enquêtes, l’analyse de l’appréciation des usagers quant au niveau de service fourni a permis de déduire des enseignements utiles pour la conception des systèmes de distribution d’eau par points d’eau collectifs.

Enfin, une analyse essentiellement bibliographique des études de volonté de payer a conduit à formuler des recommandations méthodologiques et pratiques propres à assurer une qualité convenable de prévision de la demande en mode projet.


Objectif et méthodologie de la seconde partie

Objet : décomposer les coûts de divers systèmes de distribution d’eau potable suivant une grille appropriée, à partir de coûts collectés sur un grand nombre de cas couvrant l’ensemble de la gamme des systèmes envisageables sur les quartiers périurbains ou les petits centres, et, à système donné, des niveaux de service et des contextes différenciés, de façon à élaborer les fonctions de coût de ces systèmes. L’objectif est donc de fournir un outil d’aide au choix des variantes possibles et à leur conception optimale.

Quatre types de sources de données de coûts ont été exploités. Une analyse des coûts d’investissement a été menée sur la base d’évaluations de budgets ex ante (au niveau d’études de faisabilité : Ouganda, Haïti) ou d’évaluations ex post (Haïti, Bénin, Algérie). Par ailleurs, une analyse des comptes d’exploitation de divers comités de gestion d’eau ou de régies municipales a également été conduite sur la base d’un certain nombre d’études récentes (Rwanda, Sénégal, Mauritanie, Mali, Haïti, Cap-Vert). L’analyse des comptes de divers services publics de maintenance et entreprises privées tenant une comptabilité analytique a enfin permis d’évaluer les charges de fonctionnement et de renouvellement des installations (Sénégal, Mali, Mauritanie). Cette évaluation a été complétée par celle des prix de vente pratiqués dans différentes filières d’importation de matériels et de pièces détachées (Guinée, Guinée Bissau, Mali).

Dans le souci de développer un outil d’aide à l’analyse des coûts, la présente recherche a également finalisé et adapté un programme mis au point par le BURGEAP sur le Cap-Vert, de façon à ce que le programme permette le calcul des coûts pour tout système d’alimentation en eau potable envisagé dans n’importe lequel des pays africains, et réponde aux souhaits et objectifs variés des utilisateurs potentiels. Ainsi, un système informatique d’aide à l’analyse des coûts a été élaboré (adaptation du programme DRACE initialement développé par BURGEAP pour la gestion de l’eau au Cap-Vert).

Les paragraphes suivants détaillent les résultats de l’action de recherche.


Les outils d’évaluation contingente de la demande pour les services améliorés en eau

La demande de niveau de service amélioré est principalement déterminée par la fiabilité du système, son coût généralisé (prix + efforts en termes de distance à parcourir et de temps d’attente aux points d’eau), ainsi que par la disponibilité de ressources alternatives traditionnelles et gratuites, et la qualité de l’eau et d’entretien des points d’eau. La volonté de payer pour les services améliorés est très sensible à la connaissance que les usagers potentiels en ont (le biais informatif est la principale source de biais).

Lorsque l’on veut identifier la demande des ménages des pays en développement pour un service amélioré d’approvisionnement en eau potable (évaluation dite " contingente " car le service est hypothétique), deux types d’approches sont possibles : une approche directe par sondage (enquêtes dites " de volonté de payer ", analyses conjointes, focus groups) et une approche indirecte par application de modèles comportementaux calés sur la demande observée en d’autres temps (extrapolation) ou en d’autres lieux (transposition).

Parmi les méthodes directes, seules les enquêtes de volonté de payer ont fait l’objet d’une validation scientifique. Une recherche menée par la Water Research Team de la Banque Mondiale a démontré, sur un cas précis, que les prévisions du choix des ménages fondées sur une enquête de volonté de payer peuvent atteindre une grande précision, à condition toutefois que soient rigoureusement suivies certaines règles méthodologiques. La plupart des enquêtes de volonté de payer menées jusqu’à présent souffrent en effet de graves lacunes. L’analyse bibliographique, l’expérience rapportée par les analystes, par les sociologues et par les chercheurs impliqués dans la mise en œuvre de ces techniques innovantes ainsi que l’expérience propre de l’équipe en la matière ont permis de formuler des recommandations détaillées susceptibles d’aider à atteindre ce bon niveau de performance prévisionnelle, en évitant tout particulièrement - ou en sachant les tester et les corriger - les principales sources de biais qui entachent souvent les résultats de ces enquêtes : biais liés au questionnaire, aux enquêteurs, à l’information des enquêtés, biais hypothétiques, stratégiques et de complaisance.

L’approche indirecte n’a guère produit jusqu’à présent de modèles dont le champ d’application puisse dépasser le seul cadre du site où ils ont été calés et ils résistent mal à l’épreuve du temps : les comportements modélisés sur une ville ou un petit centre ne sont pas transposables sur d’autres sites et ne sont pas même applicables pour prévoir de façon fiable les choix qui prévaudront dans la même ville ou le même centre quelques années plus tard. Les modèles de la demande les plus prometteurs et parmi les plus robustes sont ceux réalisés dans le cadre des recherches CERGRENE / BURGEAP selon une approche holistique. A partir des résultats d’enquêtes réalisées dans quatorze villes ou centres secondaires répartis dans quatre pays (Niger, Bénin, Guinée, Mali, plus d’un millier de ménages enquêtés au total), ces recherches ont modélisé le taux d’utilisation des bornes-fontaines par les populations non raccordées au réseau et leur consommation spécifique à ces points d’eau. Le recours aux bornes pour l’eau de boisson en saison sèche est trop généralisé pour donner lieu à un modèle robuste mais le prix de vente de l’eau aux bornes et la disponibilité des puits (rares ou fréquents) expliquent 41 % de la variance totale du taux d’utilisation des bornes pour l’eau de lessive en saison sèche. En saison des pluies, le taux d’utilisation des bornes-fontaines pour l’eau de boisson est fortement corrélé aux deux même variables ainsi qu’à la distance à parcourir : prix et distance expliquent les deux tiers environ de la variance.

Du strict point de vue financier, le coût élevé des enquêtes d’évaluation contingente (de 150 à 200 kF) pourrait être évité si l’effort de développement de modèles comportementaux était poursuivi jusqu’à atteindre un pouvoir prédictif au moins équivalent aux méthodes directes. Cependant, les enquêtes d’évaluation contingente favorisent un processus de consultation alors que l’usage de modèles préétablis favorise au contraire la concentration des pouvoirs décisionnels en aliénant les usagers et responsables locaux du processus de planification.


Recherche de modèles prévisionnels permettant d’analyser le coût standard pour divers systèmes de distribution d’eau

La modélisation des coûts d’investissement et d’exploitation des divers systèmes de distribution d’eau à des fins prédictives se heurte à des obstacles incontournables. Les coûts de production et de distribution de l’eau potable intègrent des paramètres trop nombreux pour répondre aux spécifications d’une modélisation utilisable à des fins prédictives. En effet, les composantes du coût de l’eau varient fortement selon les options techniques ; le calcul des amortissements ou des provisions pour renouvellement dépend étroitement de la politique nationale en ce domaine, qui peut prévoir ou non la prise en charge de ce renouvellement et en reporter la charge éventuelle sur le budget de l’Etat ; enfin, certains paramètres se prêtent mal à une analyse économique, alors qu’ils ont un rôle déterminant dans l’équilibre financier des exploitants. De plus, certains de ces paramètres sont difficiles à évaluer précisément : le résultat des procédures d’appels d’offres montre que les charges d’investissement (et de renouvellement) ne peuvent être définies à moins de 20 % près, les charges financières (pour le remboursement des emprunts) dépendent étroitement de la politique de l’Etat à l’égard du secteur hydraulique ; enfin le prix des matériaux, du combustible, des pièces détachées, etc. dépend très fortement de l’offre sur le marché local et donc de la sécurité des approvisionnements (grande volatilité des prix sur le marché africain).

Une modélisation " par grands postes " demeure possible et offre un grand intérêt pour les services techniques ou les bureaux d’études appelés à travailler dans ce secteur, à la fois sur le plan économique (pour inciter les exploitants à améliorer leurs performances) et sur le plan pédagogique (pour sensibiliser les maîtres d’ouvrages aux conséquences de leurs choix techniques).

Fondées sur l’analyse critique des comptes d’exploitation des centres ou des quartiers comparables, où un système de distribution d’eau fonctionne depuis plusieurs années, de bonnes estimations du coût de l’eau sont accessibles et peuvent constituer un outil précieux de gestion pour les exploitants de systèmes d’approvisionnement en eau potable ou les collectivités locales.


Système informatique

Un système informatique d’aide à l’analyse des coûts a été développé. Il est fondé sur un SGBD courant (Microsoft Access® ) et s’adapte aisément à tous les pays. Il permet, dans un environnement dédié et convivial, de définir un ensemble de réseaux et leurs composantes afin d’en calculer les coûts de fonctionnement, de déterminer le coût moyen de production de l’eau et de le comparer avec le prix de vente moyen. Il comprend :

  • un module de gestion de données où sont définis les réseaux ;
  • un module de simulation permettant de bâtir la formule de calcul des coûts, de maintenance et/ou de renouvellement (entièrement paramétrable) et de l’appliquer de façon à connaître par exemple le coût réel de l’eau produite, réseau par réseau ou au niveau d’un regroupement de réseaux et de le comparer aux prix de vente moyens ;
  • un module d’interrogation permettant à l’utilisateur, même sans connaissances informatiques, de répondre automatiquement à des requêtes-types sous la forme de listes ou d’états pré-imprimés.

» Contacts et fiche technique

Responsable de Recherche

Alain Morel à l’Huissier, CERGRENE / LABAM - Ecole Nationale des Ponts et Chaussées - 6 et 8 avenue Blaise Pascal - Cité Descartes - Champs sur Marne - 77455 Marne-la-Vallée Cedex 2 - France
Tél. : (33) (0)1 64 15 36 33 - Fax : (33) (0)1 64 15 37 64
E-mail :

Partenaires

Bernard Collignon (HydroConseil)
Janique Etienne et Serge Rey (BURGEAP)
Annie Manou Savina (GREA-AOC - Groupe régional eau et assainissement Afrique de l’Ouest du programme PNUD-Banque mondiale)
Amadou H. Maïga (EIER)

Pays concerné(s) : Bénin, Burkina Faso, Guinée, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Rwanda, Cap-Vert, Haïti
Axe(s) de recherche concerné(s) : 1.1 ; 1.2
Milieu(x) concerné(s) : quartiers périurbains et petits centres
Durée : 1 an (21/02/97 – 20/02/98)
Coût : 299 100 FF



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