retour imprimer © Lettre du pS-Eau 66 de Jul 2011

L'exprimentation de l'association Coopération Atlantique à Kindia

Guinée: Un système concluant de chloration de l'eau des sources

Pour de nombreuses localités, les résurgences d'eau souterraines constituent une alternative aux systèmes d'approvisionnement en eau de boisson. La qualité de ces eaux de sources aménagées pose néanmoins question au plan sanitaire. Dans le cadre du programme Gestion et organisation décentralisée des services d'alimentation en eau et d'assainissement dans la commune urbaine de Kindia, l'association Coopération Atlantique expérimente un système de désinfection innovant.

A juste titre, la Guinée est con­sidérée comme le château d'eau de l'Afrique. A Kindia, capitale régionale située à 150 km de Conakry, les populations disposent de plusieurs systèmes d'approvisionnement en eau potable. A coté du réseau urbain exploité par la Société des eaux de Guinée (SEG), qui dessert les particuliers et des bornes-fontaines réparties dans la ville, de nombreux Kindianais ont également recours à des forages équipés en pompe ma­nuelle, à des puits, à des sources aménagées et aussi à la récupération des eaux de pluies abondantes puisque les précipitations annuelles atteignent en moyenne 3 m d'eau.

Les Kindianais différencient l'usage de l'eau selon sa provenance et sa qualité. Par exemple, l'eau pour se laver provient souvent des puits ou des marigots, l'eau à usage alimentaire des sources. Et les sour­ces d'approvisionnement sont multiples. Le ré­seau urbain géré par la SEG distribue l'eau en ville, mais la station est insuffisamment alimentée en électricité et le groupe électrogène très souvent en rupture de carburant. Ces avaries ont pour con­sé­quence des coupu­res d'approvisionnement qui pénalisent les 2750 abonnés…
Dans la zone périurbaine de Kindia, on dénombre 67 forages réalisés par le Service national d'a­ménagement des points d'eau (Snape). Des comités de points d'eau assurent l'entretien et la gestion des installations. Les bornes-fontaines, installés en ville et alimentés par la SEG, sont gérées par l'Agence communale de l'eau et de l'assainissement (ACEA). Des réservoirs supplémentai­res sont installés à pro­ximité pour assurer la continuité de l'approvisionnement lors des interruptions du réseau. Les puits, plus de 9000 à travers les différents quartiers de Kindia, fournissent une eau putride servant aux eaux de ménage, de vaisselle, etc.
Les 16 sources aménagées permettent à la population de s'approvisionner en eau de manière permanente et l'eau qui coule des sources vers les bassins est d'une meilleure qualité que celles qui s'écoulent dans les cavités naturelles.

Malgré toutes ces ressources, les maladies liées à l'eau constituent la première cause de mortalité à Kindia: aucune de ces eaux n'est potable selon les normes de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
Coopération Atlantique,une association basée à Nantes, met en œuvre des projets de coopération solidaire à Kindia. Elle s'est intéressée à l'eau des sources, qui présente les meilleures propriétés.
Un système innovant à été mis au point dans cette optique : le dispositif de chloration Michel Morisson (DCM2), du nom de son inventeur, membre de l'association. Son objectif: transformer l'eau brute des sources en eau propre à la consommation selon les normes de l'OMS, grâce à un filtre fixé sur le robinet.

Un équipement simple qui s'adapte à toutes les situations
Une fois la source aménagée, l'eau est à l'abri des pollutions animales et végétales. Avec l'équipement du dispositif de chloration des bassins des sources aménagées, la qualité de l'eau est de plus sécurisée.
Le système DCM2 peut s'installer dans des environnements très variés, sans réglages compliqués. Il est entièrement réalisé à l'aide de tubes PVC et de flotteurs avec un plus original: une balle de ping-pong. Sa fabrication et son entretien sont simples et ont été pensés pour fonctionner sans composants mécaniques ou électroniques en permettant d'économiser la quantité de produit désinfectant (solution d'hypochlorite de calcium). C'est là la grande particularité du dispositif: seule l'eau destinée à la con­sommation est traitée.

Le DCM2 est composé de deux parties. La première est une tuyauterie par laquelle l'eau brute s'introduit. L'eau brute qui circule à l'intérieur est projetée sur la deuxième partie, le chlorateur. Ce dernier, approvisionné en hypochlorite dont le débit est réglé en fonction de ce­lui de la source, permet un mélange turbulent pratiquement instantané entre l'eau brute et la solution chlorée: c'est la verdunisation. Lorsque la cuve est pleine, un flotteur à pointeau remonte le long du chlorateur pour obturer l'entrée de la solution. Parallèlement, la balle de ping-pong remonte dans la tuyauterie pour dévier l'eau brute de la source vers l'extérieur. Grâce aux différents réglages de cette installation, la concentration en chlore de l'eau disponible dans la cuve est contrôlée. Ainsi l'eau traitée et désinfectée, prélevée au robinet de la cuve, est potable selon les normes OMS. Elle contient entre 0,15 et 0,2 mg/l de chlore résiduel libre (CRL).

Un habitant de Kindia utilise environ 10 l d'eau pour satisfaire ses besoins alimentaires journaliers. Chaque installation fournit entre 4000 et 5000 l d'eau pota­ble par jour. C'est donc entre 400 et 500 personnes, soit 50 à 60 familles, qui accèdent ainsi à une eau saine. Le DCM2 peut satisfaire les demandes en eau potable de 2 à 30 m3/jour.
Avant d'aménager une source, il faut dans un premier temps déterminer si le point d'eau à équiper est pérenne, c'est-à-dire si la source coule à tout moment de l'année avec des volumes satisfaisants pour répondre à la demande des populations concernées. Puis le captage peut être installé en protégeant la tête de source par une dalle en bé­ton. Il s'agit ensuite d'amener l'eau du captage à un bassin ma­çonné muni de robinets de puisage par une conduite en polyéthylène. Ou­tre les robinets de puisage, le bassin de 4 m3 est équipé d'un tuyau de trop plein et présente une porte d'accès en plafond ainsi qu'une vanne de vidange pour accéder à l'entretien.

Un prix de revient tout à fait accessible
Actuellement, trois sources aménagées ont été équipées du DCM2 par une équipe locale, supervisée par Coopération Atlantique. Une douzaine de sources pérennes supplémentaires ont été identifiées et cinq d'entre elles sont en passe d'être aménagées d'ici septembre 2011. Les principaux partenaires financiers du projet Facilité Eau sont la Communauté européenne, Nan­tes Métropole et 5 communes de l'agglomération nantaise (Basse-Goulaine, Bouaye, Orvault, Saint-Jean de Boiseau et Sainte-Luce).

L'aménagement des nouveaux points d'eau, leur entretien et l'approvisionnement en solution désinfectante génèrent des coûts. Le coût d'un DCM2 s'élève à 500 €. L'aménagement d'une source re­vient à 5 000 €. Le produit chloré nécessaire pour désinfecter l'équivalent d'un bidon de 20 l revient à 1,5 FG (10 000FG = 1 €). Pour une consommation en eau alimen­taire de 5m3/j, l'amortissement de l'installation complète est de 2,83 M FG/an (283 €/an). L'amortissement de l'installation représente un coup au bidon de 31,5 FG. La pri­se en compte des salaires des différents acteurs correspond à 10 FG le bidon, les frais de gestion et d'entretien à 57 FG le bidon, soit un coût total de100 FG par bidon.

En concertation avec Coopération Atlantique, en juin 2010, la mairie de Kindia a mis en place une autorité exécutive de gestion décentralisée de l'eau, l'ACEA, qui doit gérer l'activité économique liée aux points d'eau, issus des sources aménagées et chlorées, ou des forages ou des bornes-fontai­nes. Cette activité consistera à fixer un prix unitaire de l'eau (estimé à 100 FG le bidon de 20 l), à mettre en place un système de paiement et à employer des gestionnaires pour les points d'eau.
Le rôle de l'ACEA sera également de développer l'accès à l'eau potable à Kindia: former des ap­prentis pour installer le DCM2 sur de nouvelles sources, pérenniser l'initiative impulsée par Coopération Atlantique, contrôler et corriger la qualité de l'eau des sources en fonctionnement, entretenir les sour­ces, réaliser des analyses de l'eau et approvisionner les produits de désinfection.
Le DCM2 est une réponse technique locale à un problème global qui permettra aux habitants de Kindia, à travers l'ACEA, d'affirmer leur volonté d'en finir avec les ma­ladies liées à l'eau et de s'attaquer aux prochaines étapes du développement. Au-delà de Kindia, le DCM2 pourra être monté dans différents points de Guinée, voire au-delà de ses frontières.


Michel Morisson et Jonas Pardo
Coopération Atlantique(Nantes)

Email:
accueil@cooperation-atlantique.org
Coopération Atlantique(Kindia)
T. (224) 63 44 44 50
Email: kindia@cooperation-atlantique.org
Site internet: www.guinee44.fr

ACEA - Kindia - Guinée
Commune urbaine de Kindia - Kindia - Guinée
Guinée 44 - Kindia - Guinée
Guinée 44 - Nantes - France
 
 

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